
Thomas Rabe voit dans cette fusion une opportunité majeure de créer un champion national de la télévision et du streaming, capable de rivaliser avec des géants comme Netflix ou Apple TV+. Selon ses déclarations au Financial Times, les synergies entre M6, propriété de Bertelsmann, et TF1, contrôlée par le conglomérat Bouygues, sont nombreuses et porteuses d’avenir.
En 2024, les deux groupes affichaient ensemble un chiffre d’affaires cumulé de 3,7 milliards d’euros, pour une capitalisation boursière combinée de 3,6 milliards. De quoi donner du poids à cette ambition industrielle.
Un soutien prudent mais réel de Bouygues
Bouygues, toujours propriétaire de TF1, resterait ouvert à une relance du projet selon le journal économique britannique. Le groupe a déclaré qu’il était prêt à réexaminer cette opération dès que les conditions juridiques et réglementaires seraient réunies. Cette position reflète une continuité stratégique et une volonté partagée de renforcer la compétitivité du paysage audiovisuel français.
Le précédent de 2022 : un projet freiné par les régulateurs
Lors de la première tentative de fusion, Bertelsmann et Bouygues avaient plaidé pour une redéfinition des marchés de la télévision et de la publicité, en y incluant les plateformes de streaming américaines comme concurrents directs. Une vision que l’Autorité de la concurrence française n’avait que partiellement partagée.
Le régulateur avait reconnu l’impact croissant des plateformes de streaming, tout en maintenant que la télévision traditionnelle restait un média dominant. Il avait jugé que le projet présentait d’importants risques de distorsion sur le marché publicitaire, exigeant la cession d’une des chaînes principales pour autoriser l’opération — une condition jugée inacceptable par les deux groupes.
Un climat européen plus favorable à la consolidation
Thomas Rabe s’appuie désormais sur une évolution de la doctrine européenne en matière de concurrence. Il se réjouit d’un changement de ton à Bruxelles, après des années de blocages selon lui injustifiés. L’Union européenne semble aujourd’hui prête à favoriser la création de « champions européens », notamment dans les secteurs des médias et de la technologie.
Un rapport de l’ancien président de la Banque centrale européenne, Mario Draghi, a récemment appelé à approuver les fusions favorisant l’innovation et la croissance. Teresa Ribera, nouvelle commissaire européenne à la concurrence, a reçu pour mission d’évaluer l’adéquation des règles actuelles avec les réalités du marché mondial.
Un retour du projet possible à moyen terme
Le PDG de Bertelsmann se dit prêt à relancer officiellement la fusion entre TF1 et M6 dès que les signaux des régulateurs seront plus ouverts. Il envisage une fenêtre de tir d’ici deux à trois ans.
Toutefois, M6 pourrait aussi susciter l’intérêt d’autres acteurs, comme le milliardaire Rodolphe Saadé, déjà détenteur de 10 % du capital. Une éventuelle acquisition par Saadé (qui a racheté le groupe détenant BFM TV et RMC à SFR) soulèverait moins d’obstacles réglementaires qu’un rapprochement avec TF1.