TRIP de printemps de l’Avicca : la filière fibre toujours à la recherche de solutions
L’Avicca tenait ce mardi 16 mai son TRIP de Printemps. Durant ce temps dédié aux professionnels de la filière, il a été question de la fibre et de débats concernant les déploiements ainsi que les fameux plats de nouilles.
La filière de la fibre est toujours à la recherche de solutions, notamment en ce qui concerne la pérennité du déploiement. Le TRIP (Territoires et réseaux d’initiatives publique) de l’Avicca a donc été l’occasion de revenir dessus et cette année encore, l’Avicca a restitué son traditionnel Observatoire du THD.
Le déploiement de la fibre se poursuit mais il se heurte à plusieurs difficultés pour l’après-Plan France THD, avec notamment l’accès de tous les français au très haut débit ou encore la pérennité du réseau en fibre optique qui est d’autant plus importante avec le décommissionnement du cuivre qui arrive.
Un échange rugbystique
Patrick Chaize, sénateur de l’Ain et président de l’Avicca, a ouvert le colloque avec un discours aux accents de rugby. Le sénateur n’hésitant pas à y faire référence tout au long de son ouverture. Il est notamment revenu sur les difficultés du déploiement qui sont pout certaines liées au mode STOC et qui ont pour résultat les fameux plats de nouilles.
Il fustige ce mode de raccordement final laissé aux opérateurs commerciaux et non plus aux opérateurs d’infrastructures et qui a laissé de nombreux problèmes ci-et-là, mais surtout un appauvrissement des travailleurs qui sont parfois obligés de dormir dans leur voiture ou dans les NRO, faute de moyens.
Dans le même temps, Patrick Chaize salue le vote à l’unanimité de sa proposition de loi qui pourrait « siffler la fin de ce match » et le grand n’importe quoi qui peut régner dans les déploiements malgré « les discussions avec les arbitres », qui durent depuis maintenant six ans.
Outre la fibre, Patrick Chaize est revenu sur le New Deal Mobile, et surtout sur l’appel d’un New New Deal Mobile. S’il avait montré son soutien au new deal original, il se montre beaucoup plus circonspect concernant cette nouvelle version.
Le sénateur souhaite donc avoir un retour précis et détaillé de ce qui a été fait depuis le début de celui-ci afin de savoir si on ne lui « a pas promis le stade de France et que finalement, on jouera au stade de Trifouilly-les-Oies ».
La réponse de Jean-Noël Barrot
Jean-Noël Barrot, ministre délégué aux télécoms, est venu ensuite faire son discours, tout d’abord en taquinant le sénateur sur son champ lexical très lié au rugby. Le ministre s’est tout d’abord félicité de ce plan France Très Haut-Débit qui a vu la France passer de 1,4 millions de foyers éligibles à la fibre en 2012 à 34,5 millions aujourd’hui. Un succès qui est dû au collectif, le plus gros plan public-privé depuis plus de 20 ans et qui a bien fonctionné parce qu’il a été soutenu par le secteur public.
Conscient des problèmes récurrents dans les déploiements ainsi que des retards, le ministre ne souhaite pas écarter les difficultés et veut trouver des solutions pour la complétude mais aussi pour la fiabilité des réseaux, étape importante mais difficile avec près de 12 000 déploiements par jour.
Le ministre souhaite également que tous les français soient accompagnés concernant le déploiement de la fibre, plus particulièrement sur le domaine privé, mais aussi que tous puissent y souscrire, sans être forcé à le faire, sauf pour le passage du cuivre à la fibre.
L’observatoire du THD
Après cet échange qui tournait par moment autour du rugby, la fédération InfraNum a présenté son fameux observatoire du THD. La France peut se targuer d’avoir 34,5 millions de locaux raccordables grâce à l’ajout de 4,8 millions de prises l’an dernier. En tout, ce sont près de 80% de locaux qui sont aujourd’hui raccordables.
Mais malgré cet avancement, seules 18,1 millions de prises sont raccordées soit 53% d’entre elles, avec toutefois une accélération sur le nombre de primo-raccordements à la fibre avec 3,7 millions de prises raccordées au cours de l’année, ce qui représente tout de même 12 000 prises par jour ouvrable.
De bons chiffres de déploiement qui font que la France se retrouve encore en tête des pays européens en terme de déploiement et de raccordement.
Le gros du déploiement s’est à nouveau déroulé dans la zone publique avec 3 millions de prises déployées, soit dix fois plus que dans les zones très denses.
Le défi de la fermeture du cuivre
Cependant, aujourd’hui, le contexte du déploiement est encore plus particulier qu’auparavant puisque se profile la fin du cuivre à l’horizon et le secteur est également touché par l’inflation. Les coûts ont augmenté de 5 à 10% en moyenne dans les contrats de construction et déploiement, et cela peut monter encore plus haut en ce qui concerne les équipementiers.
Cette hausse impacte tout le monde du plus gros acteur au technicien qui déploie la fibre en auto-entreprise, mais cela est beaucoup plus impactant pour ce dernier qui peut devoir dormir dans sa voiture pour économiser, comme le soulignait Patrick Chaize en ouverture.
L’autre défi est la fermeture du cuivre qui doit avoir lieu d’ici 2030. Il s’agira ce réseau qui dessert 41,8 millions de locaux aujourd’hui, il faut donc encore construire un peu plus de 7 millions de prises d’ici la fin de la décennie mais il s’agit dorénavant de raccordements complexes et qui sont beaucoup plus onéreux, le prix peut atteindre de 4 000 à 6 000 euros par prise contre dix fois moins pour un raccordement « normal ».
Le rythme de fermeture se fera à raison d’un million de prises d’ici 2025 puis le rythme s’accoisera pour atteindre les 10,5 millions de lignes à partir de 2028.
Le « Good Deal numérique »
InfraNum est revenu sur le fameux « Good Deal numérique » qui avait été présenté il y a quelques semaines maintenant. La devise « égalité, pérennité et solidarité » est toujours de la partie, mais la fédération va plus loin et présente ce qui pourrait être mis en œuvre rapidement.
L’égalité vise à apporter une réponse aux raccordements non faits et surtout, aux 400 000 nouveaux logements à raccorder chaque année et les 500 000 raccordements complexes sur l’ensemble du territoire. Face à l’arrêt du dispositif du gouvernement pour les raccordements complexes, il reste encore de nombreuses incertitudes. InfraNum souhaite donc la mise en place d’une structure nationale d’investissement dans le génie civil, qui pourrait mobiliser un milliard d’euros à court terme et plus de 2,6 milliards au total.
La pérennité est la résilience des réseaux qui doit faire l’objet d’une planification nationale avec par exemple l’enfouissement des réseaux, qui évitera les aléas climatiques multiples et qui font que les réseaux peuvent être en panne pendant très longtemps actuellement.
Mais ce plan est estimé entre 5 et 15 milliards d’euros selon les ambitions d’enfouissement. InfraNum propose donc la mise en place d’un fonds de péréquation, comme cela se fait pour les réseaux de distribution d’énergie. Pour cela, la fédération estime qu’il serait possible de flécher une partie de la fiscalité existante du secteur vers cet objectif.
Enfin, en ce qui concerne la solidarité, celle-ci doit se faire entre les territoires et permettre l’équilibre économique des réseaux publics. La péréquation pourrait soit être obtenue avec le plan évoqué dans la pérennité, soit en adaptant les tarifs de marché de gros sur les territoires ruraux, ce qui représentera environ 2 euros par ligne et par mois sur ces territoires.
La transformation numérique des territoires
Mais surtout, ce qui a interrogé les intervenants, c’est le projet de loi de Patrick Chaize. S’il a été voté à l’unanimité, il mettra du temps avant d’être mis en place et les premiers effets seront lents à se faire voir. Il faudrait au bas mot plus de deux ans pour cela, ce qui nous ramène à 2025, date à laquelle le déploiement devrait être pratiquement terminé.
Le patron d’InfraNum souhaite que la loi n’aille pas à son terme d’après ses mots, il préférerait que les problèmes soient réglés avant sa mise en place et pour cela, il demande un régulateur puissant et un Etat avisé qui puissent suivre ainsi que des objectifs réalistes. De plus, il indique que la loi pourrait finalement trop contraindre et que cela ralentirait les déploiements restants.
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