InfraNum tire le bilan de la crise : Un retard de près d’un million de prises optique cette année
Fin mars, la fédération InfraNum tirait la sonnette d’alarme concernant les déploiements de la fibre quasiment à l’arrêt. La filière a demandé une étude et rend son premier bilan, à court terme.
Le confinement lié à la crise sanitaire aura mis un bon coup aux déploiements de la fibre sur le territoire. Alors que l’année 2020 aurait du être une nouvelle année record avec une prévision de 5,3 millions de prises posées, la réalité sera bien plus faible.
Avant que la catastrophe n’arrive, InfraNum s’est alarmé de la situation dans laquelle se trouvait la filière fibre. Quasiment à l’arrêt, cela augurait de possibles délais à rallonges dans les prochains mois voire années si la reprise se faisait plus dure.
« Mais la machine ne s’est pas arrêtée », après avoir atteint 30% du rythme nominal les chantiers ont repris petit à petit au cours du mois d’avril. Mais ce coup de frein brutal a été difficilement quantifiable par InfraNum qui a demandé une étude afin de mettre au clair la situation et d’envisager plusieurs solutions pour la reprise. Celle-ci a été réalisée par EY et Tactis qui ont interrogé une centaine de membres de la filière et mené une cinquantaine d’entretiens.
Des réseaux très sollicités durant la crise
La fibre et le THD (très haut débit, débit supérieur à 30 Mb/s) en général semble assez nécessaires dans la vie de tous les jours et ce caractère essentiel a été démontré lors du confinement qui a vu près de 5,1 millions de français se mettre au télétravail. L’école à la maison a également pesé lourd sur les réseaux mais ceux-ci ont tenu bon et ont permis près de 1,1 million de téléconsultations par semaine durant le mois d’avril, ce qui représente 110 fois plus qu’en février de cette année. Sans parler de la forte utilisation des jeux en ligne, des plateformes de vidéos…
De plus, internet a permis de garder du lien social entre les personnes et tout particulièrement pour les personnes isolées et fragilisées qui ont pu parler avec la famille à travers les réseaux sociaux, parfois grâce à des prêts ou des dons de matériels de la part d’opérateurs.
Ainsi, pour deux tiers des français, sans le numérique, le confinement aurait été bien plus dur.
Des difficultés de trésorerie mais pas de liquidation
L’arrêt des chantiers a eu un impact sur la trésorerie des entreprises et plus particulièrement pour les TPE et les PME. Il y a eu en moyenne une baisse de 36% du chiffre d’affaires durant le confinement et 30% éprouvent des difficultés de trésorerie selon le rapport.
Il y a eu de nombreux freins à la poursuite des déploiements comme les difficultés de déplacements des techniciens, l’absence d’EPI (équipements de protection individuels), l’annulation de chantiers ou de projets, la difficulté à obtenir des autorisations ou encore le fait de rentrer chez les clients qui pouvait être assez compliqué durant la crise.
Le rapport ne prévoit plus que 4,3 millions de prises d’ici la fin de l’année, soit 1 million de moins que prévu, dans le meilleur des cas et s’il n’y a pas reconfinement. Un niveau plus bas qu’en 2019. Cette année là, 4,8 millions de prises avaient été posées. Toutes les zones devraient être impactées par ce ralentissement, qu’elles soient denses ou peu peuplées.
Mais la situation n’est pas catastrophique et les carnets de commandes sont pleins. De fait, seulement 11% des entreprises interrogées envisagent de licencier et très peu d’acteurs envisagent le dépôt de bilan. Il faut dire que les grands opérateurs nationaux ont mis la main à la poche pour payer beaucoup plus rapidement les sous-traitants afin qu’ils soient moins en difficultés durant cette période difficile.
Pour le moment, l’activité a plutôt bien repris et affiche un rendement de 75% par rapport à avant depuis le 11 mai. Elle devrait atteindre 90% dès le mois de septembre. Il sera très difficile d’atteindre les 100% pendant encore plusieurs mois.
L’objectif de 2022 pourrait être tenu mais il faudra pour cela que tous les acteurs accélèrent un peu la cadence dès l’an prochain afin de rattraper le retard accumulé durant ces trois mois, ce qui veut dire déployer plus que les 19 000 lignes par jours pré-confinement.
Un surcoût pouvant aller jusqu’à 17%
Si les chantiers ont pu reprendre, il reste de nombreuses difficultés pour le secteur mais qui vont s’estomper petit à petit dans les prochains mois. Cela a bien évidemment un coût sur les déploiements. Si le surcoût était de 17 à 23% durant la période de confinement, il est reparti à la baisse pour atteindre les 11 à 17% depuis le début de la reprise et l’étude pense qu’il ne sera plus que 4 à 8% au quatrième trimestre de cette année.
Le surcoût a trois principales causes, 75 à 85% pour la construction et le déploiement, 10 à 20% pour le matériel et l’équipement des techniciens et enfin 5 à 10% pour les études. Il fallait en effet parfois doubler le matériel pour un binôme par exemple, deux caisses à outils au lieu d’une, deux véhicules… pour éviter les contaminations. De plus, les chantiers sont réduits pour éviter un trop grand nombre de personnes et l’adoption des gestes barrières peut ralentir le travail. Et il a fallu créer des postes de référents COVID pour l’inspection des règles.
Tout ceci se retrouvera sur la facture finale par prise. Celle-ci était d’environ 1 000€ avant la crise et aura augmenté durant cette période et devrait retrouver un niveau normal en début d’année prochaine. Le surcoût devrait être absorbé par les différents acteurs tout au long du déploiement d’une prise. Etienne Dugas, président d’InfraNum a d’ailleurs félicité Orange qui a accepté une augmentation du prix final de la prise sans problème et qui a mis en place un « boost COVID » pour cela.
Un secteur qui recrute toujours
Difficile de voir des entreprises sombrer et partir en liquidation alors que le secteur recrute encore beaucoup et devrait encore le faire dans les prochains mois. La fédération propose d’ailleurs à l’Etat de communiquer sur ces emplois alors que de nombreux salariés se sont retrouvés au chômage à cause de la crise sanitaire.
Ce ne sont certes pas des emplois à durée indéterminée mais ils devraient perdurer plusieurs années au moins, de quoi voir venir. De plus, le confinement a permis de mieux former à distance et la plateforme des plombiers du numérique pourrait bien aider à cela.
Un plan de relance
Tout ceci fait partie du plan de reprise de l’activité. Il s’agit de trouver les points pour repartir au plus vite, il s’agit d’un plan plutôt à court terme qui va être suivi d’une seconde phase : un plan de relance. Celui-ci sera présenté le 25 juin prochain et comportera des objectifs à long terme.
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