Internet en France : 5 entreprises concentrent la moitié du trafic

Selon le rapport 2025 de l’Arcep, cinq géants du numérique concentrent à eux seuls près de 50 % du trafic entrant dans les réseaux français. Une domination sans partage qui soulève des enjeux de souveraineté, d’équilibre économique et de neutralité du Net.

Serveurs

Le dernier baromètre annuel de l’Arcep, publié cette semaine, révèle une donnée saisissante : près de 47 % du trafic Internet entrant en France est généré par seulement cinq acteurs : Netflix, Google, Amazon (incluant Twitch), Meta et Akamai. Ce chiffre, issu d’une collecte menée auprès des quatre principaux fournisseurs d’accès à Internet (FAI), illustre à quel point l’Internet français est aujourd’hui façonné par une poignée de géants technologiques.

Une concentration du trafic inédite

Netflix, plateforme reine de la vidéo à la demande, reste le premier contributeur au trafic avec 12,3 %, malgré un recul par rapport à 2023. Akamai, fournisseur de CDN (Content Delivery Network), le talonne avec 12,2 %. Amazon (et Twitch) atteint désormais 9,9 %, Google 7,3 % et Meta 5,4 %. À eux seuls, ces acteurs représentent quasiment un accès sur deux aux contenus numériques en France.

Les FAI sous pression

Cette ultra-concentration a des conséquences directes sur l’économie des réseaux. Pour maintenir la qualité de service et acheminer les flux, les FAI doivent multiplier les accords d’interconnexion, en particulier via le peering privé, qui représente aujourd’hui 44,4 % du trafic (contre 54,2 % pour le transit et 1,4 % pour le peering public).

L’essor des CDN internes (des serveurs de cache installés directement dans les infrastructures des FAI) permet d’absorber une part croissante du trafic, réduisant les coûts de transit. En 2024, ils ont délivré 12,1 Tbit/s, soit 19 % du trafic vers les abonnés. Leur efficacité est telle qu’en leur absence, le trafic entrant aurait été 24 % plus élevé.

L’asymétrie des usages s’atténue

Le rapport souligne aussi un autre phénomène : le trafic sortant (données envoyées par les utilisateurs) progresse plus vite que le trafic entrant. En 2024, il a atteint 5,1 Tbit/s, soit +17,5 % en un an. L’asymétrie, longtemps très marquée, recule (1 Gbit/s sortant pour 9,9 Gbit/s entrant contre 10,6 un an plus tôt). Cette tendance serait portée notamment par la publication massive de vidéos sur les réseaux sociaux et le streaming en mobilité, dopé par des événements comme les JO de Paris.

Vers une redéfinition des rapports de force

Au niveau européen, le BEREC confirme cette transformation. Le marché de l’interconnexion IP reste jugé « sain », mais la montée en puissance des GAFAM et des CDN redéfinit les équilibres. Ces géants déploient désormais leurs propres infrastructures : câbles sous-marins, datacenters, CDN… réduisant leur dépendance aux opérateurs télécoms et accentuant les déséquilibres économiques.

Décomposition estimée du trafic en fonction de l'origine en 2024
Décomposition estimée du trafic en fonction de l’origine en 2024. Crédits : ARCEP

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