La Plan France Très Haut Débit « n’a pas réglé le problème » de la fracture numérique pour l’UFC-Que Choisir, qui critique vivement aujourd’hui le plan gouvernemental qui fête ses 10 ans cette année. L’association dénonce un très haut débit « au rabais » et exige des actions de la part des pouvoirs publics.
Alors que le gouvernement s’est récemment félicité de l’avancée du Plan France Très Haut Débit, qui prévoit d’apporter une connexion internet à très haut débit (supérieure à 30 Mbit/s) à tous les foyers d’ici 2025, l’UFC-Que Choisir a un tout autre avis.
En effet, l’association déplore un « déploiement anarchique de la fibre optique » qui aggrave la fracture du numérique, selon une étude qu’elle a mené et qu’elle rend publique aujourd’hui. C’est pourquoi elle exige aujourd’hui des pouvoirs publics « de renforcer sans délai la régulation du secteur et les droits des consommateurs, notamment en établissant un droit opposable à un Internet de qualité pour tous ».
12 millions de foyers dépourvus du « véritable très haut débit »
Selon l’étude de l’UFC Que Choisir, près de 12 millions de foyers sont toujours privés de « véritable très haut débit », soit près d’un foyer sur cinq. Même si les chiffres officiels montrent que l’objectif a été atteint, l’étude de l’UFC-Que Choisir « oblige cependant à atténuer le satisfecit du Gouvernement ».
En effet, 11,8 millions de locaux ne peuvent accéder au très haut débit qu’en souscrivant des offres utilisant des technologies hertziennes — comme la 4G fixe (Box 4G) et le THD radio — ou satellitaires. Mais pour l’UFC-Que Choisir, il s’agit de « technologies de second ordre par rapport aux offres utilisant les réseaux filaires traditionnels », comme la fibre, le VDSL et le câble.
L’inventaire des offre du marché de l’association montre aussi que les offres non filaires sont rationnées en termes de volume de données utilisables ou ne proposent pas de services courants comme la TV, ce qui est bien différent des offres internet proposées par les opérateurs, plus complètes et qualitatives.
L’association indique alors qu’en outre, avec ces technologies hertziennes ou satellitaires, « les débits peuvent s’effondrer en fonction des conditions météorologiques ou du nombre d’utilisateurs utilisant simultanément Internet ». De plus, « les usages permis par le très haut débit sont même parfois tout simplement impossibles, comme ceux nécessitant une bonne latence (visioconférences, jeux en ligne…), qui est plus de 50 fois plus élevée par le satellite que via la fibre optique. »
Pour l’UFC-Que Choisir, ces offres « ne sont qu’un très haut débit « au rabais » » alors qu’elles coûtent parfois plus cher que les offres de box internet classiques.
La fracture numérique persiste
Dans son étude, l’association a également analysé l’éligibilité au très haut débit selon la technologie et les territoires et dénonce une fracture numérique géographique qui persiste. En effet, en ne prenant en compte que les technologies filaires, plus de 20% des foyers de 45 départements, principalement ruraux, ne sont pas éligibles au « vrai » très haut débit, et le taux monte à plus de 50% dans trois départements : les Côtes-d’Armor (52,1 %), l’Ardèche (53,5 %) et Mayotte (60,9 %).
Par ailleurs, près d’un tiers des 8,8 millions d’habitants des communes de moins de 1000 habitants ne disposent pas d’une connexion internet en très haut débit, et 18,4% de ces personnes n’ont même pas droit au « bon haut débit » (8 Mbit/s) pourtant promos en 2017 par le Président de la République. Pire encore, « 10,1 % sont tout simplement privés d’un Internet de qualité ne serait-ce que minimale (3 Mbit/s) » fustige l’UFC-Que Choisir.
La faute au déploiement de la fibre optique
L’UFC-Que Choisir insiste enfin sur un troisième point important dans son étude : celui du déploiement de la fibre. Si pour beaucoup la fibre optique est une aubaine dans la vie de tous les jours, l’association avance qu’elle n’est pas toujours salvatrice.
Après voir analysé plus de 500 litiges traités en 2022 par les associations locales de l’UFC-Que Choisir, l’étude révèle « l’étendue des problèmes rencontrés par les consommateurs ayant souscrit un tel abonnement ». Parmi ces problèmes, l’association note des « rendez-vous de raccordement non honorés à plusieurs reprises, le refus de réalisation de travaux de génie civil permettant un raccordement effectif, dégradations du bâti, malfaçons techniques rendant l’usage d’Internet impossible, débranchements sauvages d’autres raccordements, etc. »
Et malgré ces nombreuses critiques, l’UFC-Que Choisir avance que les témoignages recueillis « ne constituent que la partie émergée de l’iceberg des dysfonctionnements massifs des raccordements à la fibre optique ». En effet selon ses informations, entre 15 % et 20 % des raccordements connaissent des problèmes techniques, soit plusieurs centaines de milliers par an.
L’UFC-Que Choisir dénonce ainsi la « forme d’indifférence et de complaisance des pouvoirs publics ». Mais ces derniers ont pourtant récemment lancer plusieurs initiatives pour lutter contre la mauvaise qualité des raccordements fibre, dont l’Audit Qualité Pérennité Fibre de l’Avicca, le Passeport Fibre d’Axione et les grilles de compétences de la Fédération Française des Télécoms.
Plusieurs exigences formulées aux pouvoirs publics
En raison des nombreux points soulevés dans son étude et afin de lutter contre la fracture numérique, l’UFC-Que Choisir exige des pouvoirs publics qu’ils :
- Créent un droit opposable à un accès à Internet de qualité, basé à la fois sur la détermination par la loi de débits minimaux dont doivent bénéficier les consommateurs, et sur les indemnisations dont ils devraient bénéficier si ces débits ne sont pas atteints ;
- Permettent aux consommateurs de résilier sans frais leur abonnement en cas d’échec de raccordement ou d’interruption du service ;
- Interdisent le prélèvement des frais d’abonnement et instaurent des indemnités automatiques en cas d’interruption prolongée ou récurrente du service.