Plusieurs groupes européens des télécoms veulent faire passer à la caisse les Big Tech (Facebook, YouTube, Netflix, Disney+…) pour l’utilisation de leurs réseaux. Orange, Bouygues Telecom, Telefonica ou encore Deutsche Telekom demandent à Bruxelles de les contraindre à participer au financement des infrastructures.
C’est un sujet qui fait débat depuis des années maintenant mais qui est toujours d’actualité, l’éventuelle participation au financement des réseaux par les géants du web à l’instar de Facebook, YouTube, Microsoft et Netflix.
Pour faire avancer les choses et obtenir ce qu’ils veulent, les plus grands groupes des télécoms européens appellent aujourd’hui la Commission européenne à contraindre les Big Tech à payer une somme « juste » pour l’utilisation de leurs réseaux.
Une contribution « juste et proportionnée »
Les patrons d’une vingtaine de groupes des télécoms, dont Orange, BT, Deutsche Telekom et Telefonica, expliquent dans une lettre ouverte que le Financial Times a pu consulter que ces plateformes contribuent à la très forte croissance du trafic internet, qui est de 20 à 30% chaque année selon eux, et profitent le plus des infrastructures, c’est pourquoi il est légitime d’exiger une participation financière d’après eux.
Dans cette lettre, ils avancent notamment que « les investissements futurs sont sous haute pression » et ajoutent qu’une « action règlementaire est nécessaire pour les garantir ». Et cela doit passer par « une contribution juste et proportionnée de la part des plus gros générateurs de trafic » pour amortir en partie les coûts colossaux des infrastructures qui représentent plusieurs milliards d’euros par an, notamment pour la 5G et la fibre optique. La contribution devra aussi se faire de manière transparente pour faciliter les investissements en Europe.
Parmi les signataires de cette lettre, qui sera très prochainement envoyée à la Commission européenne ainsi qu’au Parlement afin qu’une loi soit entre en vigueur à ce sujet, on peut voir Christel Heydemann, la directrice générale d’Orange, et Edward Bouygues, patron de Bouygues Telecom, qui s’étaient déjà exprimés à ce sujet. En mars, la Fédération Française des Télécoms, organisme regroupant Orange, SFR et Bouygues Telecom, a publié un rapport montrant la répartition du trafic internet mondial dont plus de la moitié ne tient qu’à 7 acteurs (Google, Netflix, Facebook, Microsoft, Apple, Amazon et Disney+).
200 milliards d’euros supplémentaires nécessaires
Les chantiers pour garantir une connexion très haut débit à internet pour tous en Europe d’ici 2030 sont colossaux et nécessitent le déploiement de la 5G et de la fibre optique dans toute l’Union européenne. Mais tout cela a un coût, et il est colossal.
Bruxelles a déjà annoncé qu’un investissement supplémentaire de 200 milliards d’euros allait devoir être fait pour remplir cet objectif ambitieux. D’ailleurs, la Commission a lancé une consultation publique sur la question du financement par les Big Tech en début d’année mais la réponse attendue initialement pour juin a été repoussée.
En tout cas, les patrons des grands groupes de télécoms européens estiment que les Big Tech ne paient « pratiquement rien pour le transfert de données sur nos réseaux » alors que sur le cloud les consommateurs sont facturés « jusqu’à 80 fois plus ».
Une contribution qui divise
Bien évidemment, les plateformes concernées par cette éventuelle contribution au financement des réseaux ne sont pas d’accord avec les propos avancés par les opérateurs et les autorités européennes et avancent déjà y participer, notamment pour le déploiement de câbles sous-marins.
L’Allemagne se montre quant à elle très critique sur cette éventuelle taxe tandis que Netflix estime qu’elle pourrait nuire à la création, pendant que de nombreux acteurs affirment que la neutralité du net pourrait être impactée. Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, affirme l’inverse et estime que la contribution par les Big Tech au financement des réseaux ne porte pas du tout atteinte à la neutralité du net.
Quoi qu’il en soit, le débat continue et pourrait durer encore plusieurs mois, voire même plusieurs années avant qu’un terrain d’entente soit trouvé entre les plateformes et les opérateurs.